Théâtre : Les présidentes

Sensation du Festival d’Avignon Off 2021, Les Présidentes laissent éclater le talent d’un stupéfiant trio de comédiennes. Hilarant, effarant, et profondément humain.

Amoureux des poètes qui savent rire au milieu du malheur, qui savent explorer notre humanité commune quelles que soient les circonstances, le metteur en scène Laurent Fréchuret a voulu partager avec le public son admiration pour la langue de Schwab, « brute et sensible, dévastatrice, sauvage », qui invite « à lutter joyeusement contre l’uniformisation ». D’une incroyable vitalité, cette langue condensée s’élève contre le fascisme rampant, le bavardage sans pensée, les normes et les certitudes.

Rassemblées un soir de Noël dans une cuisine pendant que le pape parle à la télévision, les trois Présidentes s’affrontent d’abord par le verbe, excessif et enivré, avant de passer un cap plus destructeur. L’économe Erna, flanquée d’un fils alcoolique, en pince pour le charcutier Wottila. La nymphomane Grete, dont la fille a fui en Australie, s’imagine reine de la séduction. L’illuminée petite Marie nettoie et débouche les toilettes à mains nues. Elles sont « des monstres, des furies, des suppliantes » dit le metteur en scène, qui a trouvé en Mireille Herbstmeyer, Flore Lefebvre des Noëttes et Laurence Vielle trois interprètes d’exception à la hauteur de cette partition vitriolée.

Impressionnantes, pleinement engagées, toutes trois laissent voir au milieu du désastre et de la démesure leurs failles et leurs désirs.

Durée 1h20.